La fabrique du paysage selon le système d’exploitation

Afin d’atteindre leur objectif de production, les éleveurs vont choisir le système fourrager qui leur paraît pouvoir y répondre en adéquation avec le potentiel de leur exploitation. La répartition des pratiques (pâture, fauche de prairies, cultures fourragères…) entre leurs surfaces se fait ensuite, la plupart du temps, en fonction du potentiel de chaque parcelle (labourable, fauchable, uniquement pâturable, humide, séchante…), mais aussi de leur proximité du siège d’exploitation. C’est ainsi que les parcelles les plus proches et de meilleur potentiel sont affectées en priorité au pâturage du troupeau de production, tandis que les plus éloignées et les plus pentues sont valorisées par les animaux ayant moins de besoins immédiats (par exemple les jeunes de renouvellement).

Les cultivateurs recherchent bien évidemment une activité rémunératrice eux aussi, avec des choix de productions et de systèmes culturaux décidés selon leurs débouchés commerciaux, la taille de leur exploitation et leur capacité en main d’œuvre. Au-delà, ils répartissent leurs pratiques culturales essentiellement selon l’éloignement, réservant les surfaces les plus proches aux cultures nécessitant des interventions fréquentes, et le potentiel agronomique des parcelles.

Un exemple de répartition des ressources en système d’élevage

Pour construire le modèle, nous établissons des règles à partir d’enquêtes individuelles, les hypothèses et analyses étant enrichies par les membres des groupes de savoirs mis en place pour le besoin.

 

 


 Les règles de décisions en système de grandes cultures

Les successions de cultures annuelles répondent au besoin d’optimiser les ressources fournies par le sol, le climat et, lorsqu’elle est disponible, l’eau d’irrigation. L’enchaînement des cultures dans une rotation type suit une logique de nature à la fois agronomique et économique.

Le raisonnement agronomique pousse à diversifier et allonger la rotation de culture pour bénéficier d’effets cumulatifs intéressants sur la fertilité du sol, et sur une moindre exposition aux bio-agresseurs (adventices, maladies et ravageurs). La conduite des cultures et les interventions techniques seront également adaptées. Un raisonnement guidé par une optimisation économique pousse au contraire à limiter la diversité de la rotation en augmentant la fréquence des cultures à forte valeur ajoutée, assurant une rentabilité supérieure du système. Un compromis entre effets agronomiques et rentabilité économique est recherché. Il se traduit généralement par plusieurs types de rotation sur la même exploitation avec, chaque année, une proportion quasi stable des cultures à forte valeur ajoutée dans l’assolement, assurant ainsi la viabilité économique du système de production.

Des règles économiques
Dans les exploitations agricoles, les surfaces de culture sont affectées aux parcelles en adoptant des règles de priorité suivant l’importance économique des cultures dans le système de production. Par exemple, les systèmes spécialisés sur les grandes cultures, avec un assolement à dominante maïs irrigué (en partie ou totalité), vont faire en sorte d’assurer une surface de maïs stable chaque année.

Des règles agronomiques
Lorsque la proportion de culture(s) à fort enjeu économique est atteinte dans l’assolement annuel, on peut placer les autres cultures en faisant en sorte de respecter au mieux des successions intéressantes sur le plan agronomique, évitant ainsi les monocultures plutôt défavorables. Des exceptions sur les cultures à forte valeur ajoutée comme pour le maïs irrigué voire les céréales d’hiver (blé, orge).

Des règles géographiques
La localisation géographique des parcelles par rapport aux bâtiments de l’exploitation peut aussi être un facteur décisionnel important. Les systèmes spécialisés sur les légumes frais vont raisonner à la fois sur la proportion de culture légumière dans l’assolement annuel et sur la localisation des légumes frais à proximité des bâtiments pour faciliter la conduite de ces cultures qui demandent beaucoup d’interventions. Cela peut être le cas mais dans une moindre mesure pour les parcelles en systèmes de grandes culture irriguées de printemps (maïs, soja…) pour gérer l’irrigation.

 

Des règles à la fabrique du paysage

Traduire ces règles dans un outil, avec comme enjeu la qualité de l’eau défini par un bassin versant, s’appuie sur deux étapes : la définition des principaux types de systèmes de culture puis la distribution des cultures dans les parcelles annuellement en suivant les règles.

La première étape se traduit par :

  • la répartition des cultures dans la surface agricole utile des exploitations et l’identification des cultures prioritaires,
  • la description des rotations types de cultures et des dates moyennes d’interventions techniques (travail du sol, intercultures…),
  • l’obtention des données nécessaires : enquêtes auprès des exploitants, conseillers techniques, registres parcellaires graphiques.

La seconde étape nécessite d’affecter une succession type de cultures à chaque parcelle de chaque exploitation avec deux variables de contrôle :

  • l’assolement annuel des cultures prioritaires économiquement doit rester stable dans la SAU annuelle de chaque exploitation ;
  • les cultures maraichères doivent être affectées à des parcelles situées à moins d’un kilomètre des bâtiments d’exploitation.